Une nouvelle troupe vient d’arriver au ThéâtredelaCité ! Elle sera présente au sein du CDN jusqu’en décembre 2026 et vous pourrez la rencontrer tout au long des mois à venir à travers des présentations publiques de leurs chantiers de création, ou encore lors d’un spectacle créé spécialement pour elles et eux.
Mais tout d’abord, voici la troupe, composée de sept interprètes :

Leur premier chantier de création a eu lieu en autonomie au sein du théâtre et leur a permis de s’approprier la salle de répétition en travaillant sur La Nuit des rois de William Shakespeare. Galin Stoev les retrouvera en novembre pour travailler à partir de leurs propositions.






Mais en parallèle, on leur a demandé d’écrire quelques questions, redistribuées de manière aléatoire, puis d’y répondre afin qu’ils·elles se présentent à vous. C’est parti !

Leïa Besnier
As-tu un rituel quotidien, une petite chose que tu fais tous les jours ?
Je n’ai pas vraiment de rituel, mais j’aime avoir une sorte de routine le matin. C’est pourquoi, quand je peux, je me lève assez tôt — vers 6 h — parce que j’aime beaucoup ce moment de la journée. Cela me permet vraiment de prendre mon temps, et c’est sans doute le seul rituel que je respecte le plus : prendre mon temps.
Si tu pouvais vivre dans la peau de quelqu’un d’autre pendant une journée, ce serait qui et tu ferais quoi ?
Si j’étais un personnage, j’aimerais être The Dude dans The Big Lebowski : passer ma vie en tongs, à jouer au bowling et à chercher qui a bien pu uriner sur mon tapis. Être le duc de la loose, dans toute sa poésie.
Dans un parc d’attraction, tu cherches le frisson, la magie ou l’abri ?
Dans un parc d’attraction, je pense que je chercherais d’abord les frissons des manèges à sensations, mais comme je suis assez peureuse, je finirais sûrement malade.


Matthieu Calvié
Si tu devais choisir un plat à manger pour le reste de ta vie, ce serait quoi ?
Le chirashi car j’estime que pour un plat d’une vie, il faut quelque chose de sain et de léger, mais qui cache une réelle profondeur gustative, pas quelque chose qui te reste sur le ventre et que tu regrettes. De ce fait, je pense que l’alliance du saumon, de l’avocat et du riz vinaigré constitue le juste équilibre entre plaisir et raison.
Quelle est ta plus grande fierté ?
Avoir réussi à sincèrement aimer.
Peux-tu me décrire un parfum qui t’est cher et raconter l’histoire qui l’accompagne ?
Le mélange d’odeur de friture et de fumée parfumée, ça me rappelle mon quartier d’enfance où tous les automnes, une fête foraine s’installait. J’y associe donc le souvenir de mon quartier de l’époque, les dalles de pierres colorées, les escaliers humides plein de mousse cloisonnés par de vieux murs ocres, les petits balcons dans les hauteurs ornés comme des jardins, la place de sable cuivré prisée des joueurs de boules et, moi qui, à la sortie de l’école, achetais des glaces à l’eau à 20 centimes à l’épicerie du coin.

Julien Desmarquest-Prada
Quand es-tu devenu adulte ?
Vers 21 ans, à peu près au même moment, j’ai perdu un être cher et je suis tombé amoureux. Faire un deuil et aimer profondément pour la première fois.
J’ai traversé le deuil dans l’amour que j’avais pour cette femme. Aimer et prendre soin de quelqu’un, à cette période, m’a en quelque sorte sauvé.
Ouvrir tout en grand les portes, les fenêtres de ce que j’étais, de ce que j’avais à offrir : la tristesse, la joie, la fougue… J’ai été traversé d’une immense pulsion de vie et je prenais pour la première fois conscience qu’aimer pouvait radicalement changer les choses.
Quel personnage de fiction emmènerais-tu avec toi pour un long voyage ?
Je prends souvent Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier en voyage. C’est un livre que je relis souvent quand je pars. C’est la réécriture de Robinson Crusoé, sous l’angle de sa sensibilité affective. Comment rester sain d’esprit quand on est confronté à la solitude extrême ? C’est très beau parce qu’il écrit dans un journal tout ce que ses sens peuvent capter, toutes ses expériences d’homme qui s’efforce de survivre et, de cette manière, il renaît. C’est toute la reconstruction de la civilisation à l’échelle d’un homme, qui doit réinventer la culture, les techniques, la spiritualité.
Il s’efforce de développer des méthodes pour cultiver de quoi manger, administrer son temps, étudier l’île, développer un rapport d’intimité avec son île. C’est très profond, très bien écrit et très riche de curiosités. Avec lui, on voyage vraiment et on regarde tout ce qui nous entoure avec un œil neuf, avec curiosité et ingénuité.
Quelle musique serais-tu ?
La musique que je suis c’est Sofia de Omiki et Sighter, sans aucun doute. Ou bien Free Tibet de Highlight Tribe ? Ou non, attends, Zorven de ZadernaS ! Ou bien Converting Vegeterians de Infected Mushrooms ! Attends non, il y a Storm Der Zeit de Schrotthagen. Allez, non, on dira juste : Meru de Avan7. Bref, on l’a compris, j’aime bien quand ça tape.

Tristan Jerram
Ce que tu voudrais être ?
Un caillou. T’as pas de problèmes de communication, de représentation dans la société, de savoir si t’as bien rempli le frigo à la fin du mois et si, potentiellement, tu vas mourir en traversant la route sans avoir bien regardé la couleur du bonhomme. Je pense que c’est très apaisant comme situation, caillou. Et puis, au bout d’un moment, je deviendrais grain de sable, et je pourrais me laisser porter par le vent… barouder de plage en plage, voir de magnifiques couchers de soleil, m’endormir sous les pins des Landes…
Et puis… je voudrais aussi être punk. Et rigolo. Et militant, et — Ah. Quoique, non mais oui, un caillou punk, c’est… c’est compliqué. Bon.
Quelle heure de la journée préfères-tu ?
Une heure que je préfère ? Que je… préfère ? Parmi toutes les heures de toute la journée ? Et de la nuit ? Non, mais attendez, pardon, mais… non ! Je veux dire, mais quelle question ! Choisir une heure, déjà, c’est vexer toutes les autres. Je dirais même, c’est les trahir ! Oui d’accord, j’aimerais pouvoir dire que je préfère 5h, parce que c’est l’heure de l’espoir, de se lever pour écrire, aller courir, faire la révolution, mais ce serait mentir, je dors… ! Et puis, j’aime tellement les heures miroir, les 09h09, les 23h23 ! Même si elles font les intéressantes… Alors bon, je suis désolé, mais là, c’est trop…
Quelle atroce question.
Si tu étais une demeure, laquelle serait-elle ?
Alors déjà, je serais une demeure sympa. Pas de loyer à payer chez moi, parce qu’au bout d’un moment, ça va, quoi (et bim, politique). Et puis, je serais une sorte de lieu toujours en mouvement ; à se faufiler partout, à la manière du Magicobus, à passer entre les nuages et les collines sans m’arrêter, à voyager entre les bordures de zones indus’ et des chemins de fer désaffectés jusqu’aux hauteurs des Pyrénées. Je prendrais exemple sur le Château ambulant : s’installer pour mieux repartir, continuer de découvrir.
À l’intérieur, ce serait probablement un peu bancal, à couiner de partout comme des étagères Ikea, mais à toujours inviter les copain·es à venir faire griller des chamallows et manger des Dinosaurus devant la télé. En fait, je serais une sorte de grande coloc sur pattes.
Bon, après voilà, c’est sûr que je ne vaudrais pas cher chez Century 21.

Salomé Lavenir
Quel est ton talisman/porte-bonheur ?
J’ai un talisman invisible pour les autres c’est une sensation, c’est une étoile dans mon cœur qui m’accompagne. Le tout c’est d’arriver à rester en connexion. Pour ça j’ai des rituels. J’ai un photohore avec des perles et des éclats de pierres violettes. Quand j’allume une bougie dans le photophore, ça fait des reflets au plafond et je me parle tout haut jusqu’à me sentir accompagnée. Parfois ça ne marche pas. C’est là que je m’invente des portes-bonheurs de repli mais ça s’appelle des tocs, mouais généralement ça n’augure rien de bon. Ça me met en retard plutôt. C’est aussi que plus j’oublie ces portes-bonheurs, mieux je le porte.
Qu’as-tu appris ?
J’ai appris un passage d’Audre Lorde dans Un souffle de lumière. Quand je les dis tout haut, c’est comme si les mots me ramassaient dans leurs mains.
« Ma vie est là. La sensation du drap sous mes talons quand je m’éveille… Chaque jour donné, je continue à vivre ma vie, où que je me trouve et quoi que j’y fasse. C’est cette conscience qui donne à ma vie une épaisseur merveilleuse à tout ce que je fais consciemment. La question, c’est d’essayer de savoir qui je suis, là où je suis. Et ne pas faire comme si je me débattais ici pendant qu’ailleurs, quelque part, la vraie vie attendait que je recommence à la vivre. »
Où veux-tu vivre dans dix ans ?
J’en sais rien. Je veux vivre dans mon corps.

Apolline Peccarisi
Dans ta vie, tu suis la grande quête ou tu t’attardes sur les petites ?
J’essaie surtout de suivre la « lettre de la petite Apolline pour la Apolline du futur » que je m’étais écrite il y a plus de dix ans. Je garde cette lettre comme un mantra secret et précieux.
(Bon j’espère que la petite Apolline comprend quand même que je n’ai pas pu devenir à la fois actrice et espionne, que j’ai du faire un choix.)
Quelle est ta saison préférée ?
L’été.
À la mi-août par exemple, quand je fais 1863km de voiture avec mon meilleur ami, de ma petite ville de franche-comté à la maison de mon grand père dans les Pouilles. Sur la route on écoute des chansons d’amour tristes et des émissions de true-crime les fenêtres ouvertes, on klaxonne les camions. On traverse toute l’Italie, on s’arrête parfois quelques jours quelque part si on en a envie. On se perd dans les villes, on marche au hasard des rues, on rencontre des inconnus qui deviennent nos compagnons d’un soir. On s’invente des histoires, on se prend pour des aventuriers, on va se baigner de jour comme de nuit sur des plages bondées ou désertes, de sable ou de cailloux, on joue avec les vagues, on joue à se couler, on se jette du sable dessus, on essaie de faire des figures acrobatiques et on les rate, on saute du haut de grands rochers, on reste étendus sur le dos, portés par le mouvement de l’eau en silence.
L’été je voyage, je me sens un peu comme la reine du monde.
C’est un long trip chaud passé au soleil, au bord de l’eau, à la fête avec les gens que j’aime.
Si tu pouvais avoir un super pouvoir, lequel choisirais-tu et pourquoi ?
En ce moment je dirais celui de me téléporter. Pour pouvoir aller prendre ma nièce dans les bras quand elle se réveille tôt le matin, fumer une cigarette avec ma sœur dans un coin de la France, puis aller boire un café en terrasse avec mes copines à Marseille, remonter bien plus au Nord et manger un bout chez ma grand-mère, faire un tour de vélo sur les quais à Paris, puis revenir ici à dix heures pour commencer à répéter.

Lalou Wysocka
Quel est l’endroit où tu préfères dormir ?
Je vis à l’âge où l’on ne dort nulle part / Les seuls lits d’où je rêve sont des quais de gare / J’ai loué un placard pour mes robes d’hiver / j’ai tué les parents / Oh je veux partir sur la seule route où il y a du vent/ je suis là jeune fille aux cheveux blancs / aux cheveux blancs
(je veux dormir au creux des mots des chansons que j’aime, ce soir, Camille)
Si tu pouvais jeter sortilège, quel serait-il ?
En tant que sorcière de ma profession, je ne manque pas de recettes, baguettes et autres potions, filtres, talismans, formules, pour apparitions, disparitions, téléportations, don de vie aux êtres inanimés, dons de paroles aux êtres couinants, ni de grimoires, de prières, de balais-tapis volants, ou de mixtures dégoulinantes à l’odeur douteuse et au goût mortel.
Je dirais même que je les ai tous, ces sortilèges et ces trésors magiques-là, dans ma lourde, lourde besace.
Mais mes préférés sont ceux que je ne peux pas dire à haute voix.
Et je garde, dans la poche cachée près de mon cœur, la fiole très précieuse qui permet à l’amour mort de revenir à la vie.
Si tu pouvais choisir un coup de fil ?
Allô, sœur jumelle de vie parallèle ?
Allô, Johann Sebastian Bach ?
Allô, la meuf qui m’a volé mon casque Marshall dans les vestiaires de la salle d’escalade il y 1 an et demi ?
Allô, Bouddha ? Et Tara, ça va ?
Allô, le Rochefort ?
Allô, les demoiselles de Rochefort ?
Allô, l’idole des jeunes ?
Allô, Michel Oslo ?
Allô, la maison de mon enfance, 21 rue des sapins ? Comment ils vont les sapins ?
Allô, Papa ?
Allô, Dionysos ? Je t’aime gavé.