Portraits d’artistes – François GremaudThéâtredelaCité

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Portraits d’artistes – François Gremaud

Quelle meilleure façon d’appréhender la création d’un∙e artiste que d’avoir le temps de se familiariser avec son univers ? Ces artistes-compagnons qui viennent à votre rencontre avec plusieurs propositions — de la médiation à l’installation et aux spectacles, nous les avons choisi∙e∙s pour la singularité des pistes qu’ils∙elles ouvrent dans le théâtre d’aujourd’hui. La diversité de leurs projets se reflète déjà dans les brefs portraits qui suivent : chacun∙e est une amorce, un visage, un fragment d’intention pour vous donner l’envie de les découvrir et, surtout, d’approfondir l’expérience avec eux et elles tout au long de la saison.

FRANÇOIS GREMAUD
Auteur, metteur en scène et interprète
2b company

© Niels Ackermann

« Mettre de la joie en partage »

Auteur, metteur en scène et interprète, François Gremaud fait partie des artistes suisses qui ont marqué la deuxième édition de La Biennale de Toulouse, manifestation transdisciplinaire dédiée aux arts vivants et impulsée sur ses deux éditions d’ouverture par le ThéâtredelaCité. La découverte de ses spectacles par le public toulousain a posé les bases d’une belle rencontre réciproque. C’est avec une envie inaltérable « de mettre de la joie en partage » qu’il revient cette saison plus durablement sur trois périodes qui jalonnent l’année, en tant qu’artiste accompagné par le ThéâtredelaCité. Avec, dans son bagage de trublion, la trilogie complète de ses héroïnes fétiches et un seul-en-scène plein d’humour où il dévoile le mystère de sa foisonnante créativité.

TROIS ŒUVRES, TROIS INTERPRÈTES, TROIS SEMAINES

Elles sont « femmes, amoureuses et ont en commun de partager un destin funeste » dit d’elles François Gremaud qui a l’art de la formule et celui des petites formes théâtrales singulières, malicieuses et exigeantes. Sa compagnie, la 2b company, basée à Lausanne et co-fondée avec son complice Michaël Monney, a fait le choix depuis ses débuts, pour
des raisons économiques mais aussi esthétiques, de créer des spectacles au dispositif scénique minimaliste portés par un∙e seul∙e interprète et qui peuvent se jouer partout, avec une grande liberté. Choix en lien plus global avec des préoccupations écologiques qui se soucient de décroissance, en prise avec l’époque, cette épure dans la forme est aussi bien sûr un choix artistique qui met en lumière le jeu et les interprètes respectifs des trois volets. Chacun∙e, au prétexte de raconter l’histoire d’une héroïne célèbre à travers trois
œuvres bien connues du théâtre classique, du ballet ou de l’opéra, finit par incarner tous les personnages de l’œuvre dont il est question. À l’origine créés pour une commande
du théâtre de Vidy-Lausanne pour les scolaires, l’enthousiasme a rapidement gagné tous les publics. Phèdre !, porté par Romain Daroles, revisite ainsi la tragédie de Racine sous forme de conférence paradoxalement hilarante. Giselle… prend les traits de la formidable danseuse Samantha van Wissen (lauréate du Prix de la « Meilleure interprète de la saison » par le Syndicat Professionnel de la Critique) et Carmen. la voix lyrique tout terrain de Rosemary Standley (chanteuse du célèbre groupe Moriarty) qui chante aussi bien la partition de l’héroïne que celles des hommes qui causeront sa perte. Le ballet et l’opéra sont accompagnés par un quintet de femmes, un choix féministe dont François Gremaud explique tout simplement qu’il est sa façon à lui de faire de la politique.

LE METTEUR EN SCÈNE SEUL EN SCÈNE

Les comédien∙ne∙s s’appuient donc sur une langue savoureusement réécrite par François Gremaud à partir des textes et des livrets d’origine. « À chaque début de projet, j’écris une sorte de journal littéraire et je compose un corpus inspiré par chaque interprète. Ensuite, ensemble, nous collaborons, on modifie ce qu’il faut au plateau, avant la dernière phase qui est celle des représentations, où le spectacle peut encore évoluer un peu en fonction de l’adresse au public. Nous avons en effet la chance inouïe de faire un art bien vivant ! ». C’est ce processus d’élaboration à la fois personnelle et co-construite, nimbé de désir, de nécessité, de confiance et parfois d’aléatoire, qu’il décrit et incarne lui-même avec humour dans son solo Aller sans savoir où : « Je raconte ma façon de faire du théâtre et, en même temps que je parle de ma façon de travailler, je parle aussi bien sûr de ma façon de voir le monde. À chaque fois, je pars à l’aventure et, chemin faisant, j’invente, avec de formidables interprètes, des œuvres qui se réinventent avec le public au jour le jour ». Le solo ponctuera chaque semaine de représentations des volets de la trilogie (décembre, février, et avril), comme autant d’occasions supplémentaires offertes par le ThéâtredelaCité pour ouvrir une fenêtre sur l’univers et la fantaisie salutaire de François Gremaud. Ce dernier cite volontiers les philosophes qui l’accompagnent dans son processus créatif : Gilles Deleuze pour la joie comme outil de résistance, Clément Rosset qui lui a appris à être idiot (au sens étymologique de singulier, particulier, unique) et enfin Jeanne Hersch qui place l’étonnement à la base de toute pensée, jolie façon de maintenir intacte sa capacité à être surpris et à s’émouvoir.

Projets présentés durant la saison

 
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