Croisement entre un spectacle vivant et sa version digitale
Découvrez la série ci-dessous :
Créer un objet numérique inspiré d’une expérience vivante de spectacle, telle est l’ambition des 6 épisodes de 15 minutes avec pour point de départ la pièce d’Ivan Viripaev Insoutenables longues étreintes mise en scène par Galin Stoev.
Réalisée pendant la fermeture du théâtre au public en 2021, cette mini-série, à la frontière entre théâtre et cinéma, retrace le voyage initiatique de quatre trentenaires en quête d’identité et de sens. Dans leur monde, sous des couches d’aliénation et de solitude, se cache une insoutenable tendresse qui transcende l’humanité et qui est peut-être la seule raison de leur existence.
DOSSIER : L’ATELIERCITÉ
Pendant le confinement, vous n’avez pas pu assister à la création du spectacle au CUB en décembre 2020, certain∙e∙s
d’entre vous ont eu la chance de découvrir son adaptation en plein air cet été. Vous pourrez être beaucoup plus nombreux∙ses à le voir au ThéâtredelaCité du 9 au 19 décembre puis en tournée de janvier à avril 2022 !
DOSSIER : L’ATELIERCITÉ
À 27 ans, il est le metteur en scène associé à l’AtelierCité, la troupe éphémère du ThéâtredelaCité installée dans les murs. Il partage avec ces comédien∙ne∙s en devenir l’enthousiasme des jeunes artistes auxquel∙le∙s on donne enfin carte blanche pour bâtir et montrer leur travail dans de bonnes conditions. Sorti récemment de l’école du TNS, Simon-Élie Galibert a choisi Thomas l’Obscur, roman incontournable de Maurice Blanchot comme porte d’entrée sur son univers et une histoire d’amour ratée comme point de départ…
DOSSIER : L’ATELIERCITÉ
Depuis deux ans, malgré les théâtres fermés et les publics confinés, l’AtelierCité, la troupe éphémère du ThéâtredelaCité, n’a pas chômé. De la création du Tartuffe à la tournée de Faustus à venir dans les lycées d’Occitanie, des toutes dernières créations Sans fins. et Chiot de garde aux seul∙e∙s en scène d’ancien∙ne∙s de l’AtelierCité (La Fugue, J’ai rêvé d’un cafard…), la variété des propositions qu’ils∙elles nous donnent à découvrir cette saison témoigne de la belle vitalité du dispositif.
DOSSIER : LE CORPS EN MOUVEMENT CET AUTOMNE
Mazùt, pour Baro d’evel, c’est un retour aux sources. Un retour aux sources animales de l’humanité tout d’abord. Si, en 2012, Camille Decourtye et Blaï Mateu Trias créent ce duo, c’est pour partir à la recherche de l’animal qui les habite. Faire tomber les défroques, les peaux qui les couvrent – travail, habitudes, modernité – et retrouver l’instinct du mouvement et du souffle. Respirer, être au monde, juste ça, comme sont les bêtes. Redevenir des Humains à tête de cheval, et apprendre à se tenir debout dans un monde qui fuit de partout et se déchire en morceaux. Surréaliste et mythologique, romantique et clownesque, âpre et tendu, Mazùt représente aussi pour ses créateur·rice·s un retour aux sources des pièces qui l’ont suivi, Bestias, Là (présenté du 22 juin au 2 juillet avec et au théâtre Garonne) et Falaise. Dix ans après, ils renouent avec cette origine en transmettant leur duo à deux de leurs fidèles compagnons de route.
Mazùt, pour Baro d’evel, c’est un retour aux sources. Un retour aux sources animales de l’humanité tout d’abord. Respirer, être au monde, juste ça, comme sont les bêtes.
C’était en mai 2021. Je revenais au théâtre pour la première fois après des semaines de confinement et des mois de fermeture des établissements culturels. Le ThéâtredelaCité
rouvrait et donnait la dernière création de la compagnie Baro d’evel, Falaise.
J’avais, enfin, le plaisir de me retrouver dans le ventre de la salle obscure, dans un confinement aussi volontaire qu’éphémère, qui n’était plus isolement et distanciation sociale, mais rapprochement et rassemblement avec d’autres qui avaient fait, au même moment, le même choix que moi.
De Falaise, je retiens une image, en lever de rideau : un pied, chaussé d’un gros soulier, troue brutalement la muraille qui s’élève autour du plateau. Le coup est franc, puissant : il arrache des gravats crayeux et ouvre une brèche par laquelle passe bientôt un corps que l’on entend marmonner des choses incompréhensibles, dans un parler oscillant entre langue d’Espagne et langue de la folie.
Je pouvais interpréter ce coup de pied initial de deux façons : comme une libération, que venait immédiatement confirmer un vol d’oiseaux, passant soudain d’un coup d’aile de coulisse à coulisse, ou comme un geste de destruction dans une scénographie qui est peu à peu percée, dégradée, détruite par d’autres pieds et jambes qui la mettent en ruines.
Les arts corporels sont une chance pour le théâtre car ils lui ouvrent un champ, voire des outils de réinvention et d’inspiration.
DOSSIER : IVANOFF (ENTRETIENS)
On s’est lancé·e·s dans une véritable recherche expérimentale. Dans le texte de Fredrik Brattberg, Ivanov offre des marionnettes à Sacha pour son anniversaire. Nous nous sommes donc posé·e·s la question de ces marionnettes, voir si elles ne pouvaient pas être virtuelles et ainsi travailler avec des avatars, plutôt qu’avec des marionnettes physiques. L’équipe trouvait l’idée très excitante ! Comme c’est quelque chose que nous ne savions pas faire au théâtre, le ThéâtredelaCité nous a proposé un temps de recherche. C’est un terrain complètement vierge, ce qui est vraiment passionnant. C’est plutôt concluant alors nous continuons sur cette piste ! L’idée est d’implémenter le jeu des acteur·rice·s dans les attitudes des avatars. Des systèmes de reconnaissance faciale permettent une complète interaction entre les acteur·rice·s et leur avatar, ainsi la parole, les mouvements et les déplacements des acteur·rice·s peuvent être repris par leur avatar. C’est intéressant d’avoir ce type d’exploration et surtout de voir comment les comédien·ne·s se l’approprient, car l’idée est avant tout de faire du théâtre !
Travailler avec des avatars, plutôt qu’avec des marionnettes physiques, une idée très excitante !
DOSSIER : IVANOFF (ENTRETIENS)
Que représente Ivanov pour vous ?
Comme Hamlet, Ivanov est un personnage qui n’agit pas, ce qui me fascine aussi bien d’un point de vue philosophique que personnel. Comme de nombreux existentialistes, je trouve la réflexion sur la naissance d’une action très intéressante. Est-il possible d’aller jusqu’au bout d’une pensée pour ensuite agir, ou l’action vient-elle d’abord et les pensées après, de manière à rendre légitime ce que l’on vient de faire ? Je suis également fasciné par la manière dont Ivanov semble être entré dans une autre dimension. Ivanov se place loin du monde réel, loin de l’action, mais il est en même temps en contact avec quelque chose de différent et peut-être de plus grand.
Le fait de réécrire ce chef-d’oeuvre de théâtre est un défi important, qu’est-ce qui vous a motivé dans ce projet ?
L’invitation de Galin à participer à ce projet a provoqué chez moi, je dois l’avouer, une profonde réflexion. Je devais trouver l’indispensable connexion entre ma façon d’écrire et cette pièce. J’ai un parcours de compositeur et mon écriture prend sa source dans la composition de musique, pour laquelle les répétitions constituent l’ingrédient formel essentiel. En tant qu’auteur dramatique, je travaille avec des schémas de répétition dans lesquels je laisse les mêmes scènes revenir avec des petits changements. Après plusieurs lectures d’Ivanov, je me suis tout d’un coup rendu compte de quelque chose finalement d’assez évident – le personnage d’Ivanov comporte un élément de répétition : il est toujours la même personne qui n’agit pas et les mêmes scènes reviennent en quelque sorte, tout simplement parce qu’il n’arrive pas à résoudre le conflit qui s’y joue. Les problèmes d’Ivanov reviennent comme des mélodies dans une symphonie. D’autre part, comme je l’ai déjà évoqué, on a l’impression qu’Ivanov est passé dans une autre dimension. Dans IvanOff, Ivanov n’arrive même pas à aller au bout de la pièce dont il est le personnage principal, il la quitte pour rejoindre une troisième pièce. La forme et le sens se rejoignent ici et justifient pour moi le fait de réécrire Ivanov.
À quoi ressemble votre IvanOff ?
C’est la pièce de Tchekhov entièrement dépouillée. Les dialogues sur le passé des personnages et leur petit monde et toutes les blagues classiques de Tchekhov ont été enlevés. Restent Ivanov et ses relations avec les autres personnages. La pièce est divisée en quatre actes et, dans chaque acte, je prends des éléments de la pièce de Tchekhov que je répète pour faire apparaître l’essentiel de chaque acte. Je m’évertue à ce que la forme de chaque acte épouse le sens, c’est-à-dire que la forme crée le sens et que le sens crée la forme – je recherche ce processus dans toutes mes oeuvres dramatiques. D’autre part, ce que j’aime beaucoup chez Tchekhov, est le fait qu’il peut être tragique à un moment, puis comique la seconde d’après sans que le public ait l’impression que la pièce change de registre. Je m’efforce de garder cet aspect dans IvanOff. J’ai le sentiment que la pièce oscille en permanence entre le tragique et le comique, laissant le choix aux acteur·rice·s à tout moment de basculer d’un côté ou de l’autre.
Fredrik Brattberg a 43 ans et est entré dans l’écriture dramatique par la musique. Récit par cet écrivain traduit dans une vingtaine de langues, du pourquoi et du comment de cette création d’IvanOff.
DOSSIER : IVANOFF (ENTRETIENS)
Que représente Ivanov pour vous ?
Le théâtre de Tchekhov constitue un rituel, c’est l’épreuve du feu pour les jeunes comédien·ne·s. À cet âge, on s’identifie à des personnages comme Nina ou Treplev. Mais en vieillissant, les textes de Tchekhov ont continué de m’émouvoir. Pour moi, cet auteur est un médecin qui dissèque l’être humain, dans sa beauté et sa laideur, et parle en même temps de l’état général du monde. Le personnage d’Ivanov, plus particulièrement, est perçu comme le « Hamlet russe » pour moi. Un personnage pris dans ce qu’on appelle aujourd’hui dépression, incapable d’agir malgré sa grande lucidité, incapable de se relier au monde extérieur.
Pourquoi avez-vous passé commande d’une réécriture à Fredrik Brattberg ?
Au départ, je voulais travailler sur le texte originel. Puis, j’ai compris qu’il y avait des dimensions du texte que je voulais plus particulièrement développer, d’autres que je voulais effacer. J’avais rencontré Fredrik Brattberg à la Colline par la mise en lecture d’un de ses textes, Retours. Et j’avais lu d’autres de ses textes ensuite. Je cherchais un complice, quelqu’un avec qui échanger sur le texte et créer une forme qui vienne du futur plutôt que du passé.
Comment avez-vous procédé ?
Nous avons passé un grand nombre d’heures à parler sur Skype. On a commencé pendant le confinement alors que le monde entier était mis à l’arrêt, avec comme point de départ l’état de ce personnage qui fait écho à l’état du monde actuel. Puis, j’ai partagé à Fredrik mon amour pour Tchekhov qui révèle nos faiblesses au grand jour avec tant de bienveillance. On a aussi parlé de la dimension comique chez Tchekhov qui n’est jamais facile à appréhender. On s’est demandé comment raconter cette histoire dans une époque contemporaine. Et Fredrik m’a parlé de sa manière d’écrire, avec des thèmes récurrents et des fantaisies, de ses textes qui sont comme des partitions musicales. Son style aussi très dépouillé, avec des situations très simples. Chez Tchekhov, les personnages s’épanchent beaucoup, tandis que Brattberg pratique la logique de l’haiku et te dit tout et rien à la fois.
Au final, quelles sont les grandes caractéristiques
de cet IvanOff ?
Quand j’ai reçu le texte, je n’ai pas saisi tout de suite. J’ai commencé à le comprendre grâce à la première session de répétition de trois semaines avec les interprètes au printemps 2021. Fredrik écrit en créant des sortes de cartes géographiques de l’état physique et émotionnel de chacun des personnages. Son texte est une cartographie où figurent des points à relier. Et c’est au metteur en scène et aux comédien·ne·s de constituer ces liens. Le texte de Tchekhov et celui de Brattberg sont assez éloignés, mais tout ce qui est de l’ordre de la vacuité chez Brattberg pourrait être nourri de ce que Tchekhov avait écrit dans son texte. Là où Tchekhov est dans le réalisme, Brattberg crée des mondes parallèles, à la David Lynch ou à la Lewis Carroll, tout en respectant de près le texte source.
Avec la trame de la pièce de Tchekhov et l’écriture de Fredrik Brattberg, célèbre auteur norvégien, Galin Stoev plonge Ivanov, le « Hamlet russe », dans un futur où l’on pourrait vite basculer. Explications avec Galin Stoev
Il est encore difficile de mesurer l’impact qu’aura durablement sur nos vies la pandémie de la Covid-19 et de pouvoir dire ce qui a le plus modifié nos habitudes quotidiennes, nos façons de travailler, nos loisirs et nos priorités personnelles. Le monde de la culture a, comme les autres, été touché de plein fouet, théâtres fermés et équipes confinées. Pour autant cette année écoulée dans un lieu comme le ThéâtredelaCité sans pouvoir accueillir de spectateur·rice·s n’a paradoxalement pas eu que des conséquences désastreuses.
De confinements en mises à l’arrêt, d’espoirs de reprise en reports de calendrier, la création ne s’est pas effondrée et elle a su s’organiser pour (re)trouver ses marques. Du laboratoire au plateau, ces nouveaux rythmes ont façonné de nombreux spectacles du premier trimestre, auxquels ils donnent une identité particulière